Fort de son expérience en tant qu’ingénieur et consultant blockchain, Monsieur Babacar Lô a décidé de créer un lab à Dakar dédié à la technologie blockchain. Dans cet entretien, Babacar nous confie son optimisme et son ambition concernant l’utilisation de cette technologie au Sénégal, et plus largement en Afrique. Rencontre avec StartupBRICS.
Par Thomas Pascal & Antoine Fournier, contributeurs StartupBRICS
Bonjour Babacar, vous avez créé le Lab Blockchain de Dakar. Pouvez-vous nous parler de la naissance de ce projet ?
Je suis tout d’abord un passionné de technologie. En tant qu’expert en software engineering, j’ai pu réaliser dans le cadre des différentes entreprises pour lesquelles j’ai travaillé, à quel point la technologie blockchain ouvrait de multiples perspectives. La création du Lab Blockchain est donc, dans un premier temps, une réaction vis-à-vis de tout ce qui se fait partout dans le monde.
Depuis 1 an et demi, je m’intéresse à la technologie blockchain en faisant le tour des universités. J’organise des rencontres pour sensibiliser les étudiants et les professionnels à cette nouvelle technologie. Au vu de la demande de formations sur la blockchain de ces différents acteurs, nous avons décidé de créer un cadre de recherche, de partage et d’échanges autour de l’innovation, basé sur le potentiel de la blockchain.
Pour l’instant nous sommes 5 à travailler sur ce projet et notre lab ainsi que notre site Internet sera effectif à partir de fin novembre.
Quels sont aujourd’hui les objectifs du Lab Blockchain ? Et quelles sont les raisons qui vous ont poussé à créer ce lab ?
Nous souhaitons innover par la blockchain dans notre lab pour éviter les lourdeurs de processus au niveau des institutions ou au sein des entreprises. Le lab permettra aux acteurs de se retrouver dans un environnement plus flexible pour la recherche, le prototypage et les tests d’innovations technologiques.
Nous avons pour stratégie d’organiser des workshops pour tout ce qui est formation à destination des étudiants et de certaines équipes d’entreprises. Ces équipes n’ont pas forcément de ressources sur ces technologies, nous essayons alors de les accompagner. Le lab va être une opportunité pour les services publics, les entreprises privées, les particuliers ou encore les entrepreneurs. Nous avons déjà un premier focus sur le secteur public. Nous pourrons en reparler plus tard.
Pourriez-vous nous parler d’un projet en particulier sur lequel vous travaillez dans le cadre du Lab Blockchain ?
En ce moment, nous travaillons sur l’État civil qui est un réel problème en Afrique de l’Ouest notamment. Nous réfléchissons beaucoup sur l’identité et testons différentes avancées qui pourraient permettre de combler quelques manquements. On essaye de combiner une identité numérique avec l’état civil afin, par exemple, qu’un nouveau-né acquiert une identité numérique facilement accessible.
Il est primordial de construire un système robuste afin de faciliter l’identification de nouveaux nés ou de jeunes enfants. En effet, dans certaines parties du Sénégal, plusieurs personnes obtiennent des bulletins de naissance tardivement, ce qui pose un problème pour les insérer dans le système ensuite. Il arrive parfois que des enfants de 5 ans n’aient pas encore été déclarés. Avec la blockchain, nous essayons de trouver un système pour remédier à cela.
Quelles sont les différentes activités du Lab Blockchain ? Pouvez-vous nous parler de sa raison d’être puis des activités que vous souhaitez opérer au sein de ce lab ?
Nous souhaitons nous positionner entre la recherche, l’industrie et les services publics en créant un cadre d’échange et de partage de connaissances sur les technologies blockchain et l’intelligence artificielle.
Pour se positionner sur ce créneau, le Lab Blockchain est un lieu de production d’innovations pour les entrepreneurs, les particuliers, les étudiants et professionnels où ils pourront mener leurs recherches, concevoir des prototypes et tester leur travail. Mais aussi, c’est un lieu où on accompagne des formations sur les technologies blockchain et sur l’intelligence artificielle à travers des cohortes et workshops. Nous accompagnons également les entreprises dans leur étude d’adoption de la technologie blockchain.
Nous avons prévu de lancer officiellement toutes les activités du lab et le site internet pour fin novembre 2018.
Pour vous, quels sont les apports de la blockchain pour les entreprises et l’Etat dans le cadre du Sénégal et de l’Afrique en général ?
On le dit souvent mais cela reste un constat implacable: la blockchain est une révolution technologique. Cette dernière va améliorer un grand nombre de choses et particulièrement en Afrique. En effet, je pense que cette technologie est encore plus pertinente pour nous les Africains que pour les Européens. Il existe chez nous des déserts institutionnels que l’on ne retrouve pas en Europe. Nous n’allons pas utiliser la blockchain de la même façon qu’en Europe ou aux Etats-Unis, où certains de nos problèmes sont déjà résolus. La blockchain va permettre à l’Afrique de meilleures performances en matière de correction de données, de transparence ou encore de sécurité. Il y a des problèmes dans l’économie, la politique ou l’ordre social que nous avons trainés depuis longtemps sans jamais les résoudre et que nous allons pouvoir, aujourd’hui, résoudre grâce à la blockchain.
Cette technologie ne va pas résoudre tous nos problèmes. Mais combinée avec l’intelligence artificielle et les objets connectés, la blockchain va nous permettre d’améliorer de nombreux secteurs de l’économie, et notamment l’agriculture dans les milieux ruraux.
Pour résumer, je pense qu’avec la blockchain, nous allons faire le même saut technologique que nous avons fait avec le mobile.
Avez-vous un mot de la fin pour conclure cette interview ?
La blockchain est une révolution et nous avons l’occasion d’y participer, devenir acteur et ne pas subir la révolution technologique. Donc ne ratons pas le coche ! Ou que nous soyons en Afrique, c’est de notre devoir de s’intéresser à ces choses-là et d’aider notre pays à participer à cette révolution qui impactera le monde.