L’Afrique, nouvelle frontière du e-commerce ? Cela ne semble pas forcément aller de soi, au regard des nombreux défis présents sur le terrain, défis logistiques, défis culturels aussi. Un Amazon africain ne ressemblera en rien à son équivalent américain. En effet, que l’on observe le Nigeria, le Sénégal, le Kenya ou encore la Côte d’Ivoire, les obstacles sont légions : casse-tête logistiques parfois énorme -mais pas insoluble – avec la livraison de colis dans des villes où l’adressage est parfois inexistant, situation où la géolocalisation ne s’applique tout simplement pas. Egalement la question du paiement mobile même si de plus en plus d’africains s’adonnent au mobile money, la question de la confiance reste centrale : en Afrique, la culture du cash reste très importante et payer en ligne par carte bancaire ne va pas (encore) forcément de soi.
Le e-commerce en Afrique doit générer son propre écosystème, reposant sur de l’innovation continue
Pour que le e-commerce prenne et s’accélére en Afrique, il faut donc innover rapidement et inventer un « écosystème du e-commerce » spécifique et qui épouse les réalités du continent. Il faut donc s’adapter aux usages, comprendre les besoins locaux, et innover, rapidement. Ce qui par exemple passe l’option « Cash on Delivery » (livraison du produit à domicile avec paiement directement en cash, avec possibilité de refuser le produit sans frais) pour les utilisateurs réticents à utiliser leurs cartes de crédits sur internet. Un service que les plateformes Kaymu ou Jumia proposent déjà au Sénégal, au Nigeria et ailleurs.
D’autres voient encore plus loin dans l’innovation e-commerce Made in Africa : l’on pourrait bientôt contempler des drones livrer directement des produits à Lagos ou Kinshasa – depuis les entrepôts vers le client – créant de nouveaux circuits logistiques aérien. Un moyen de répondre aussi à la question du manque d’infrastructures, qui ne sera pas résolu dans les 10 ans. De la science fiction ? Pas vraiment : le Flying Donkey Challenge veut imaginer et amorcer ce que pourraient être les nouvelles autoroutes commerciales du continent africain, via les premiers drônes africains.
D’autres innovations sont déjà là ou en cours d’amorçage, à l’image de WeShopUp, jeune startup franco-africaine, qui propose une nouvelle solution mixant crowdfunding et e-commerce : l’achat groupé par la foule. Une solution qui correspond particulièrement à la mentalité africaine, en reprenant à son compte le modèle des Tontines – une pratique d’investissement très populaire en Afrique- qui permet à plusieurs individus de s’associer pour effectuer ensemble un achat.
Cédric Atangana, fondateur de WeShopUp nous en dis plus. Interview.
Hello Cédric ! Peux-tu te présenter à la communauté StartupBRICS ?
Hello ! Je m’appelle Cédric Atangana, élève Ingénieur en Informatique et Génie Industriel. Camerounais d’origine et marseillais d’adoption, j’ai étudié le Lean et les sciences de l’information. Un peu poète des fois mais plus orienté vers l’exploration, les limites de l’Homme d’aujourd’hui et celui d’autrefois. Je suis passionné d’innovation dans tous les domaines et suis prêt à abattre des murs, construire des ponts pour atteindre mes objectifs. Je n’ai pas peur de démarrer à partir de rien et je suis muré et ancré dans ma foi. La foi que toute personne positive et dévouée à changer le monde, verra l’invisible, sentira l’intangible et réalisera l’impossible. J’aime les challenges de très haut niveau et « Design, Créativité et Innovation» sont mes maîtres mots.
J’ai fondé en 2011 la communauté Google Developers Groups au Cameroun, communauté dévouée à initier tout passionné de développement web et mobile aux technologies de pointes Google (Web, Mobile, Robotique etc.), à initier la gente féminine aux nouvelles technologies et à perfectionner les amateurs afin qu’ensemble nous puissions produire des solutions innovantes à très forte valeur ajoutée localement et globalement. C’est l’une des communautés Google les plus en expansion en Afrique aujourd’hui, elle a grossi de 4 développeurs en 2011 à +2000 développeurs en 2014 avec le titre de communauté ayant produit le plus d’applications mobiles en Afrique lors du AFRICA ANDROID CHALLENGE 2014.
Baignant dans cet écosystème IT de très haut niveau et aussi grand passionné de robotique, j’ai fondé, avec des personnes exceptionnelles en Afrique, INFINITY SPACE, une tech startup spécialisée dans l’innovation technologique au sens large et basée aujourd’hui au Cameroun, au Kenya (incubé chez iHub) et en France (incubé chez Marseille Innovation). Du fait de notre souci particulier pour l’insertion de la gente féminine dans les hi-tech, notre équipe est constitué de 50% d’hommes et 50% de femmes à ce jour dont 16% sont Ingénieures en Technologies Innovantes. Il y a quelques jours déjà que nous avons lancé WeShopUp, notre premier produit, avec pour mission de faire en Afrique ce qu’Alibaba a fait en Chine !
Peux tu nous présenter ta startup WeShopUp ?
Pour comprendre WeShopUp, il faut comprendre 2 concepts clés : le crowdfunding et l’e-commerce. Le crowdfunding est le moyen par lequel plusieurs personnes se mettent ensemble pour financer une même initiative sur internet. C’est un concept très utilisé par les jeunes startups aujourd’hui pour inviter des personnes du monde entier à découvrir leurs concepts et collecter ainsi des fonds en ligne pour lancer leurs produits ou leurs services.
L’e-commerce est l’ensemble des services et la logistique associée, mis à la disposition des internautes pour leur permettre d’acheter des biens et services sur internet sans avoir besoin de se déplacer vers le marchand.
Alors, WeShopUp est une plateforme de vente en ligne qui révolutionne l’industrie du crowdfunding et du e-commerce en combinant les deux concept pour offrir aux consommateurs finaux des articles de qualité à des prix défiant toute concurrence. C’est une sorte de tontine électronique. Basiquement, il est question d’amener les gens à se mettre en groupe sur notre plateforme de vente en ligne pour acheter les articles qui les intéressent communément et d’obtenir des rabais renversant du fait d’acheter en gros et en groupe. Au final, le prix unitaire des articles se voit considérablement réduit et tout le monde pourra s’offrir le tout récent iPhone 6 par exemple sans payer son prix d’un.
Concrètement, comment cela fonctionne ?
Nous avons plusieurs cas d’utilisation possibles. Pour le cas d’un anniversaire, le départ en retraite d’un collègue ou un nouveau-né dans la famille par exemple, une personne peut créer un groupe d’achat sur WeShopUp, choisir des articles et inviter secrètement des amis communs à contribuer pour lui offrir un cadeau. Ainsi, pour offrir une belle montre de 300€ à une amie qui fêtait son anniversaire, nous avons créé un groupe d’achat et plusieurs personnes ont contribué directement sur WeShopUp pour l’acheter ; ce qui n’est pas possible sur la majorité des sites d’e-commerce aujourd’hui.
Pour un autre cas, pour les petits revendeurs qui proposent le même produit dans un pays, au lieu d’importer leurs produits (1.000 unités par exemple) chacun séparément et payer les droit d’importation tout seul (ce qui rend le produit plus cher à la revente), ceux-ci se mettent en groupe sur WeShopUp et au lieu de commander 1.000 unités, ils en commandent 10.000 ou 100.000, ce qui leur vaut un achat en gros chez nos fournisseur donc, de très grand rabais. Ainsi, les frais de port sont réduits et le client final peut avoir ses articles à des prix défiant toute concurrence.
Nous travaillons aujourd’hui à construire le plus grand réseau de fournisseurs et de revendeurs sur toute la planète, afin que les personnes en Afrique (et partout dans le monde) puissent avoir des produits de qualité à très bas prix suivant ce concept que nous avons baptisé : « isCloud Supply Chain» ou « INFINITY SPACE Cloud Supply Chain »
Quels obstacles avez-vous rencontré dans le développement de WeShopUp et comment y avez-vous fait face ?
Le plus grand obstacle d’INFINITY SPACE, mais qui en fait aussi sa force principale, est le travail à distance de ses membres qui pour beaucoup ne se sont jamais rencontrés de face. Notre équipe est dispatchée sur 4 pays aujourd’hui : le Cameroun, le Kenya, la France et l’Angleterre. La diversité culturelle a quelques fois été difficile à gérer au début avec certains membres (ceux du Kenya et de l’Angleterre) qui sont Anglophones et d’autres (ceux du Cameroun et de la France) qui sont francophones ; Mais très vite, tout le monde s’est mis à l’Anglais et au Français avec un zeste de Swahili et ce n’est que du bonheur aujourd’hui. Qu’est-ce qu’on se marre bien dans cette équipe! Nous avons aussi rencontré des difficultés au niveau des décalages horaires entre les pays et surtout le problème de très faibles débits d’internet en Afrique pour travailler efficacement pendant nos visio conférences sur Google Hangouts. Il nous a donc fallu investir (relativement) beaucoup d’argent pour équiper les équipes en Afrique de matériel de travail adéquat pour continuer à travailler à distance. Finalement, il s’est posé le problème de financement pour nos développements et nos prototypes, et nous n’avons pas hésité à nous mette en mode « Job d’été » pour rassembler les fonds nécessaires à l’avancée de nos travaux et avons participé à de nombreux concours de startups internationaux.
Malgré toute ces difficultés-là, nous avons réussi l’exploit d’être classés 2e meilleure startup du monde sur 1047 venus de 72 pays lors du MILLION POUNDS STARTUP CHALLENGE en Septembre 2013 à Londres en Angleterre, 2e meilleur projet de création d’entreprises d’Innovantes lors des 36h Chrono de la création d’Entreprise Innovantes en Novembre 2013 à Marseille en France et surtout meilleure startup du monde au Google I/O Pitch Night en Juin 2014 dans la Silicon Valley aux USA (60 secondes de pitch, $20.000 de récompense).
Pourquoi le e-commerce en Afrique et pourquoi maintenant ?
Tout simplement parce que l’Afrique est le continent qui présente le plus grand taux de croissance en 2014 ; c’est un continent plein de jeunes talents disséminés sur tous les pays Africains et qui ont besoin qu’on raccourcisse la distance entre le matériel dont ils ont besoin pour leurs innovations et leurs lieux de travail ou de co-working. Beaucoup de grands site d’e-commerce tel qu’Amazon etc. ne livrent quasiment pas en Afrique et surtout en Afrique sub-saharienne par ce qu’ils y rencontrent beaucoup de difficultés. Mais pour nous, chaque difficulté est une potentielle opportunité ! Nous avons décidé de relever ce challenge et faire en Afrique (et pas que) ce qu’Alibaba a réussi à faire en Chine !
Quels sont vos besoins ? Etes-vous à la recherche d’investisseurs ?
Aujourd’hui, pour atteindre ces objectifs-là, nous avons plus besoin de l’énergie positive des Hommes, que beaucoup de personnes rêvent avec nous de changer le monde, que beaucoup fasse converger leurs efforts et que tout le monde travaille avec nous. Parce que nous sommes jeunes et convaincu que si nous courbons l’échine tous ensemble, quelque soient le pays, le continent etc., nous réussirons à rompre tout obstacle. Nous voulons créer le plus grand réseau de fournisseurs et de revendeurs pour préparer le terrain pour d’autres innovations que nous gardons secrètes pour le moment, nous les invitons à nous contacter (fournisseurs, fabricants et revendeurs) et à travailler avec nous afin que nous rendions cette ambition réelle. Maintenant, pour aller plus vite, doper notre potentiel de productivité et gagner en vitesse, nous faisons aussi un appel aux investisseurs du monde entier.
Un dernier message à faire passer ?
« The people who are crazy enough, to think they can change the world, are the ones who do. » – Steve Jobs.